ANDRE COTTAVOZ
« Les couleurs du Titien, le contour de Michel Ange », a écrit le Tintoret sur le mur de son atelier. « Le contour de Rubens, les tons de Rembrandt » a noté Delacroix dans son journal. Manet descend de Goya et Vélasquez, Picasso de Lautrec et Steinlen (mais personne ne confond, dit-il, les œuvres de sa jeunesse avec celles de ces artistes). Vlaminck disait que le jour du vernissage de 1903, il avait plus aimé Van Gogh que son père. L’artiste a des parents spirituels. Ceux de Cottavoz sont Dufy et Kokoschka.
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Il a reçu de Dufy l’aptitude au bonheur, de Kokoschka une cadence tragique ; de Dufy le décor, de Kokoschka le drame. Synthèse insolite dont le résultat est une peinture sombre et lumineuse, nordique et méditerranéenne, fauve et expressionniste.
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Le fauvisme c’est la joie de vivre, vivre par les couleurs. L’expressionnisme, c’est la passion individuelle de l’homme moderne.
Cottavoz tente d’unir ces deux aspects. Son moyen : retrouver la nature. A une époque abstraite, il est figuratif ; il est peut-être « le » figuratif parmi les jeunes.
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Il peint et dessine comme quelqu’un qui arrose son jardin. Ses paysages s’épanouissent comme des fleurs. C’est un berger qui pousse son troupeau vers l’horizon, le troupeau de son arsenal pictural ; une ligne déchirée (et sensible comme des nerfs), des formes mouvementées et vivantes ; là où elles s’arrêtent surgit un arbre, une colline, une maison, un nuage, une vague – la nature renaît sous la surface du papier et de la toile. Les petits points des divisionnistes que Dufy a dispersés sur l’image, deviennent ici du pollen, de la rosée, des larmes.
Cottavoz prend la terre, le ciel, la mer comme dans ses bras. Ses œuvres respirent comme des poumons.
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Avec l’héroïsme des jeunes (il est né en 1922) Cottavoz remonte à la grande tradition de 1900. Cézanne a découvert les formes élémentaires derrières les formes naturelles ; il les a montrées incorporées au monde visible. Les peintres abstraits les ont dépouillées, les ont transformées en signes, en symboles, en géométries. Cottavoz va les ramener à la nature.
« Cottavoz » prend place parmi les peintres vraiment peintres » disait de lui Pierre Courthion dans son livre L’Art Indépendant. Sous son pinceau naît une nouvelle image des villes, de l’homme, un nouveau paysage.
IMRE PAN